Autrice / Dulce Maria Cardoso
Lu pour vous par Leserin
Si un nom disait tout, Eliete serait une drôle de femme, née en 1974 peu après la Révolution des oeillets au Portugal. Eliete travaille comme agent immobilier, est mariée, a deux filles, une voiture dans le garage et une maison avec vue sur la mer. Elle n'a pas de dettes, pas d'ambitions, un peu envie et peu de volonté d'être plus que ce qu'elle a toujours été : moyenne.Le roman de Dulce Maria Cardoso, pourrait sembler aussi ennuyeux que la biographie de son personnage. Sauf que les choses ne sont jamais exactement comme elles semblent l'être, et la vie d'Eliete non plus. Heureusement pour le lecteur, cela devient vite évident lorsque la "vie normale" d'Eliete est interrompue par l'hospitalisation soudaine de sa grand-mère et la découverte qu'elle souffre de démence. C'est alors qu’elle commence à se rendre compte que quelque chose ne tourne pas rond.Au début, Eliete ne sait pas si le problème vient uniquement de sa grand-mère ou d'elle-même. Après tout, pourquoi y aurait-il un problème ? Elle avait tout ce qu’elle avait toujours désiré. Mais Eliete réalise qu’elle est seule, malgré la famille, les amis, le travail.
De petits changements commencent à apparaître, mais pas les vrais grands et nécessaires. Il y a des masques qu'il est impossible de faire tomber.
Le roman est dominé par les femmes (Eliete n'est que l'une d'entre elles) où les générations se succèdent en espérant que les dernières pourront être capable d'échapper aux chaînes du passé.Bien que ce livre ne porte pas sur l'Estado Novo ou la Révolution, il y a de nombreuses références à ces deux périodes. Elles planent au-dessus de toute l'histoire - comme une ombre. En y regardant de plus près, la "vie normale" d'Eliete peut servir de métaphore au monde d'aujourd'hui où, inondés d'informations, nous semblons incapables de voir ce qui se trouve juste sous notre nez parce que nous sommes enfermés dans notre propre bulle - celle de notre vie, de notre maison, de notre normalité. Devons-nous ignorer ce qui se passe autour de nous et avancer comme si de rien n'était, ou devons-nous sortir et affronter la tempête ? Nous ne savons pas si Eliete y parviendra - le roman se termine de manière abrupte et laisse le lecteur accroché à la phrase "Fin de la première partie". Il faudra attendre le prochain tome pour connaître le dénouement de l'histoire.
Eliete est une invitation à la réflexion, personnelle et n'est-ce pas ce que fait toute bonne littérature ?
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